'A les croire, les membres de 'Trunks' se réunissent juste parce qu'ils se manquent. Un groupe? Un collectif? Au départ, un défi du Jardin Moderne pour fêter ses 5 ans: créer un groupe éphémère. Trunks a tellement le sens de l'éphémère qu'il est toujours là, vingt ans plus tard. Ala sensibilité à fleur de peau de Laetitia, au duo de guitaristes en forme de pile, Fromentin l'esthète et Marzano l'expressionniste, à la batterie-monde de Régïs Boulard ne manquait plus que le saxophone inlassable de Daniel Paboeuf, venu nous dit-on pour 'faire plus de bruit' - mon oeil! Tous jettent un voile pudique sur leur sophistication et leur exigence. Trunks est d'abord une histoire de respect et d'amitié. Cinq personnages en quête, non d'un auteur comme dirait l'autre, mais d'une émotion nouvelle, qui n'adviendrait que lorsqu'ils sont ensemble. Une liberté conquise à plusieurs. Une problématique: comment faire, au-delà des mots et de leurs déclarations d'intention, pour trouver la combinaison qui met les poils au garde-à-vous?La musique est nette comme une chaîne de montagne effilant l'horizon, faite de contrastes, de reliefs, de flux, de montées et de tensions, parfois extrêmes. Un processus tectonique qui sédimente avant de se hérisser, en quête d'une dynamique où plus rien ne s'entend d'autre que l'intensité, la beauté, l'adrénaline et le vertige. La musique de Trunks se trace à la façon du sismographe, comme le cardioscope de l'écriture beat - le choix de textes de Kerouac pour habiller le premier album ne devant rien au hasard. Narrative, quelque chose s'y raconte, mais c'est pas 'le Club des Cinq': l'histoire ici ne se paye pas de mots et à la fin, il n'y a pas de coupable.Évidemment, ça n'a pas de nom, et ni le mot 'noise', ni 'jazz', ni 'rock', ni 'pop' ne parviennent à tracer l'abscisse ou l'ordonnée d'une frontière. Alors qu'est-ce que cela veut dire? Rimbaud, poète beat, répondait à sa mère: 'Ce que ça dit, littéralement, et dans tous les sens'. Il n'avait jamais lu aucun épisode du Club des Cinq'